C’est aussi la rentrée pour le transport routier. Est-ce le calme avant la tempête. Ce qu’on appelle la trêve estivale n’a pas été aussi calme que cela pour le transport routier puisque le débat sur le projet de taxe poids-lourd et l’état des infrastructures routières a ponctué l’été avant le dramatique effondrement du pont Morandi à Gênes, le 14 août dernier. Cela a remis une couche puisque le gouvernement souhaite faire payer les transporteurs alors que ces derniers sont déjà les plus gros contributeurs au budget des routes. Mais entre-temps, Karima Delli, députée française au Parlement Européen, présidente de la commission transports, abonde dans le sens du gouvernement français …
Des années sans investissement … comment rattraper le temps perdu !
Deux informations sont donc venues animer la semaine qui s’achève ce 24 août. Lors de la rentrée du gouvernement, le compte rendu du conseil des ministres de rentrée a laissé une part à l’actualité … la sécurité des ouvrages d’art a été l’occasion d’une communication d’Elisabeth Borne, Ministre des Transports (et ingénieur en chef des ponts et chaussées) qui rappelait que le Président de la République avait affirmé dès juillet 2017 que la priorité en matière d’infrastructures de transports devait aller à l’entretien des réseaux existants. Nous y sommes donc et trois mesures importantes ont été annoncées :
- La mise en place d’un conseil d’orientation des infrastructures (COI), chargé de recommander au Gouvernement une stratégie pour les infrastructures prenant en compte les nouvelles priorités.
- Le lancement d’un audit réalisé par des experts internationaux sur l’état du réseau routier national, afin de réaliser une photographie de l’état du réseau, d’auditer la politique de gestion du patrimoine et de chiffrer les besoins d’investissement des 20 années à venir.
- Sans attendre les conclusions du COI et de l’audit, augmenter les crédits de l’entretien routier, pour passer de 700 M€ en 2017 à 800 M€ en 2018. Cette hausse se poursuivra dans les prochaines années.
Elisabeth Borne a une compétence technique évidente …
Il faut préciser que depuis plus de dix ans, les budgets attribués à l’entretien des routes n’a fait que baisser, d’où les dégradations constatées sur tout le territoire. Alors aujourd’hui, c’est l’état d’urgence et les recommandations du COI et de l’audit du réseau routier constitueront la base de la programmation des investissements qui sera inscrite dans la loi d’orientation des mobilités présentée au Parlement à l’automne 2018. Des priorités en sortiront et selon la ministre, « cette programmation permettra, pour la première fois, de sortir des aléas des budgets annuels pour donner une visibilité à moyen terme à nos trajectoires d’investissement. »
Mais l’argent, il faudra le trouver quelque part. D’où la crainte des organisations professionnelles (OTRE, FNTR) qui ont chacune publié un communiqué en s’opposant à d’éventuelles augmentations de la fiscalité à la charge des transporteurs … mais le danger ne pourrait-il pas venir de l’Europe. En effet, dans une interview à France Info diffusé le 19 août, Karima Delli, députée européenne EELV, présidente de la commission transports du Parlement européen, annonce qu’une discussion a lieu “sur la mise en place d’une taxe poids lourds sur l’ensemble des camions à l’échelle européenne” en rappelant que le Parlement européen a adopté la réforme “de l’euro redevance”, début juin 2018, c’est-à-dire “la mise en place du principe pollueur-payeur”.
Karima Delli, députée européenne annonce une taxe pour tous les poids-lourds
La députée, 39 ans, originaire de Roubaix (Hauts-de-France) assure que les recettes de cette future taxe poids lourds « iront en priorité à la sécurisation de l’ensemble des infrastructures au niveau européen et nous ferons en sorte qu’il y ait moins de camions sur les routes et qu’on relance le fret ferroviaire. Nous allons faire en sorte d’investir sur une mobilité qui soit durable et accessible pour tout le monde » … et de conclure « Le Parlement a pris ses responsabilités, maintenant il faut rentrer en négociations avec les États membres et j’invite le gouvernement français à nous appuyer et à porter cette nouvelle redevance poids lourds qui ne sera pas basée sur le temps, mais sur les kilomètres. ». Voilà où nous en sommes à la fin du mois d’août 2018 … Il convient de rester vigilent !