Parc : les méthodes pour booster sa rentabilité

Proposer un prix de marché compétitif tout en restant rentable. Voilà une question difficile pour les transporteurs. L’équation de base : Prix de vente = Coûts de revient + Marge amène à travailler sur les dépenses liées au parc de matériels roulants et à son entretien. De la visibilité informatique s’avère indispensable.

(Article rédigé par Christelle Bretaudeau dans TRM le Guide G7)

La diminution des kilomètres à vide et l’optimisation des chargements retours sont des objectifs permanents pour les exploitations. Un transporteur a souvent un parc de matériels, roulants ou de manutention, assez diversifié, notamment au niveau de ses semi-remorques. Celui-ci lui permet de répondre à tout type de demande de ses prospects ou de ses clients.

On recherche quotidiennement des informations sur les équipements, les caractéristiques des matériels, un document, un numéro de série, etc. Cependant les normes Euro, les poids à vide, les prises FMS (Fleet management system), les versions de chronotachygraphes, les types de garanties, etc. sont autant de données éparpillées dans l’entreprise, contenues dans des classeurs, des tableurs ou dans la mémoire individuelle. Dans ce contexte la recherche devient chronophage et improductive.

 

Un objectif central : augmenter la productivité de ses équipes et lancer une analyse comparative entre gestion interne et externe

 

L’objectif minimal est donc de stocker et d’organiser toutes ces informations au même endroit dans une base de données informatique. Y accéder en deux clics est pertinent et très vite rentable. Plus rapide, plus riche et plus sécurisé qu’un tableur Excel, le logiciel va également proposer des écrans de contrôle et d’alerte sur l’imminence d’une échéance d’entretien périodique et réglementaire.

Réglementation et anticipation

Les rythmes des contrôles obligatoires sont assez simples à retenir mais les entretiens périodiques, dont les vidanges, peuvent se révéler plus complexes à mémoriser. Chaque marque et chaque modèle de VI ont un intervalle de vidange différent. Les parcs des transporteurs sont composés à la fois de plusieurs marques et de plusieurs modèles.

Le dirigeant doit s’assurer en permanence du bon respect de la réglementation car il est en le seul garant. Le responsable technique doit, lui, veiller à suivre le plan d’entretien des constructeurs sous peine de dégrader les performances des véhicules ou de se voir refuser une garantie en cas de panne.

 

Les solutions de parc facilitent la vision et le suivi des révisions obligatoires. Mais le principal problème des responsables de parc réside dans la disponibilité des matériels pour réaliser leurs entretiens à intervalles réguliers et mener des actions préventives. Deux points de vue s’opposent et semblent difficilement réconciliables. Du côté de l’exploitation, le matériel doit toujours être disponible pour rouler. Mais côté atelier (interne ou externe), il doit être revenu pour être révisé en temps et en heure.

Cette situation génère souvent des tensions internes. Ces nombreux échanges tendus, souvent improductifs entre les collaborateurs, ainsi que les pertes de temps pour trouver des solutions dans l’urgence sont directement liés à un manque d’anticipation. Nous constatons d’importants coûts indirects engendrés par des demandes d’intervention de dernière minute sans que les équipes techniques ne soient informées au préalable.

On assiste donc à un enchaînement de problèmes à l’atelier : une indisponibilité de la pièce adéquate, une commande urgente à un prix plus élevé, un manque de disponibilité des mécaniciens qui n’arrivent pas à s’organiser par manque de visibilité sur les travaux à réaliser. Ce sont autant de conséquences inévitables tant avec un entretien internalisé qu’externalisé. Tout cela amène inévitablement à une immobilisation plus longue que nécessaire du matériel. L’impact économique est conséquent : c’est un coût d’improductivité, tout le contraire de l’objectif premier visé par l’exploitation.

Changer de paradigme

C’est dans ce contexte de cercle vicieux que l’informatisation de parc frappe aux portes des entreprises. L’informatique n’a pas pour vocation de régler tous les problèmes. Mais elle peut faciliter la mise en place de solutions. De plus informatiser son parc revient aussi à vouloir changer de paradigme et prioriser le bon entretien de son parc par rapport à la maximisation de son roulage. Cet outil prévisionnel, renforcé par un dialogue constructif entre une exploitation et une direction technique est une source d’optimisation des coûts. Il améliore la situation entre l’exploitation et l’atelier.

 

Le logiciel de gestion de parc doit être interfacé le TMS, pour pouvoir positionner une indisponibilité sur le planning de l’exploitation

 

Cependant l’exploitation doit également pouvoir disposer de moyens pour travailler et exécuter les demandes des clients. Pour y parvenir les logiciels de gestion de parc doivent être obligatoirement interfacés avec la solution informatique d’exploitation (TMS) ; ceci dans le but de pouvoir positionner une indisponibilité (appelé aussi un voyage improductif) sur le planning de l’exploitation, à la date et aux créneaux horaires nécessaires pour les opérations de révision.

Une telle démarche favorise la diffusion de l’information en temps réel. Elle donne donc la possibilité à l’exploitation d’anticiper, connaissant désormais à l’avance, dans son planning, les moments où les moyens ne seront pas disponibles. Les gestionnaires de flotte peuvent décaler, reprogrammer leur voyage, informer leur client, rechercher un moyen alternatif (sous-traitance, location, etc).

Des coûts de détention et de roulage

Si les outils de gestion de parc permettent d’optimiser les coûts, c’est parce qu’ils doivent gérer des éléments financiers. On distingue deux grandes familles de coûts de revient : les coûts de détention et les coûts de roulage. Les premiers, lorsque le matériel ne roule pas, sont toujours à la charge du transporteur. Ils sont constitués par les remboursements des loyers de location financière, de crédits baux ou d’emprunts. Mais il faut également prendre en compte les valeurs et les durées d’amortissements ainsi que les dépenses liées aux accessoires annexes dans les véhicules comme ceux des équipements embarqués : unités centrales, tablettes ou smartphones et mensualités au titre des services récurrents. A chaque fiche matériel, il est impératif que chaque ligne de coût soit attachée et typée par nature. On peut également ajouter aux coûts de détention ceux liés aux visites réglementaires et les full services. Pour les contrôles obligatoires, la solution logicielle devra passer des commandes affectées aux immatriculations puis compiler et catégoriser automatiquement les prix d’achats.

 

Concernant les entretiens, deux cas de figures peuvent s’envisager. Ils peuvent être externalisés via des contrats de full service ou de délégations de maintenance mis en place avec des concessionnaires. Dans ce cas, ce sont bien des charges fixes. Il faut donc pouvoir enregistrer le coût mensuel, les kilomètres maximaux inclus au contrat et les dates de début et de fin de contrat. Tout cela vise trois objectifs : inclure cette charge dans les coûts de revient mais aussi pouvoir réaffecter au bon moment les poids lourds présentant un excédent kilométrique roulé par rapport aux moyennes initiales ; et enfin éviter des facturations de kilomètres supplémentaires en fin de contrat. Au contraire, les vidanges peuvent être réalisées dans l’atelier de l’entreprise. Dans cette deuxième option, les charges sont semi-variables car si le véhicule ne roule pas beaucoup, la vidange s’espacera mais ne disparaitra pas complètement. Au bout d’un certain nombre de mois, la vidange sera tout de même obligatoire. La gestion des entretiens en interne nécessite le déploiement de modules de gestion d’atelier.

Des coûts à cache-cache

Dans ces solutions, les travaux sont matérialisés par des OR – Ordres de Réparation. Ils sont valorisés par le temps de travail, la main d’œuvre, la quantité et les prix des pièces de rechanges consommées. Pour comptabiliser la main d’œuvre, il est impératif que les mécaniciens indiquent l’heure de début et de fin des travaux. Un système de flashage à partir de douchettes offre simplicité et rapidité d’exécution pour une mise en place rapide. Il faudra bien entendu avoir déterminé le coût horaire moyen, chargé, de ses salariés rattachés à l’atelier.

La véritable difficulté réside dans la valorisation des montants de consommation en pièces mécaniques. Une pièce achetée est stockée et débitée si elle est nécessaire à la réalisation d’un OR. Une gestion de stock s’impose donc. Pour un type d’article déterminé, l’entreprise peut s’approvisionner chez plusieurs fournisseurs avec des prix différents, ou parfois en pièce d’origine puis en marque distributeur. Les prix sont donc variables. Alors lequel doit-on prendre en compte ? La réponse se trouve dans le prix moyen pondéré de chaque article. Pour arriver à cela, il faut gérer l’ensemble de son stock par des références internes. Ce travail est le plus lourd à mettre en place mais il aboutira à la réduction du nombre d’emplacements dans le stock (une référence interne permet le rangement à un seul emplacement de plusieurs références fournisseurs équivalentes), et à une valorisation au prix le plus juste des pièces dans les OR. Les montants totaux des OR seront ainsi correctement calculés et affectés aux immatriculations et le stock valorisé aisément pour chaque inventaire.

Le même principe s’applique à la gestion des réparations par le déclenchement et la valorisation d’OR mais les coûts s’agrègent dans des natures différentes. Il est important de les différencier des coûts d’entretien obligatoire. L’entretien est subi mais les réparations doivent être mesurées et stables dans une proportion définie. Les réparations ne sont pas censées être un coût plus important que celui des entretiens obligatoires.

 

Chaque commande d’achat à un prestataire est liée à un matériel. Finalement les coûts cachés du départ deviennent plus lisibles. Les niveaux de stock diminuent car les OR sont plus anticipés et les solutions logicielles peuvent également surveiller les niveaux du stock pour éviter la rupture malgré des flux de commandes plus tendus.

Un poste de charge incontournable : le carburant

Il n’est pas possible d’éluder le poste de charges le plus pesant dans une entreprise : le carburant. La plupart des FMS ont un module qui non seulement simplifie le calcul des consommations véhicules, la déclaration de la TICPE mais également l’affectation des coûts liés à ce poste dans chacun des moteurs.

Toutes les prises de carburant et autres fluides comme l’Ad Blue ou le GNR, disponibles en fichiers informatisés, peuvent être intégrées dans le logiciel. Tous les pétroliers proposent la fourniture de fichiers récapitulant les prises réalisées sur la route. C’est aussi le cas des logiciels de gestion de stations carburant internes comme Madic ou Alx. Les litrages sont valorisés par les prix de ventes des stations indiquées dans les fichiers. Quant aux prises internes, leur montant est calculé par un prix moyen pondéré, opéré par le FMS, qui gère aussi de son côté, les commandes d’achat de gasoil en vrac.

 

Une fois la totalité des pleins et appoints de carburant inclue dans le module, et après les contrôles indispensables d’un gestionnaire, le logiciel a tout pour éditer les consommations par véhicules avec un comparatif par mois, et répartir les valeurs dans chaque immatriculation. L’édition de ces consommations est l’unique donnée fiable et juste. Toutes les autres données issues du CanBus ou de l’informatique embarquée sont approximatives : elles ne prendront jamais en compte le vol de carburant, par exemple. Elles ne peuvent donc pas être utilisées pour un suivi précis des coûts de revient.

Deux mots d’ordre : rigueur et suivi

Il s’étoffe d’année en année de nouvelles fonctionnalités et il serait long de toutes les citer. Gestion des conducteurs, de leurs échéances de formations obligatoires, de leurs compétences, des amendes, des sinistres, sont autant de modules disponibles pour les entreprises de transports pour faciliter l’organisation et rentabiliser les coûts.

Bien évidemment, si l’investissement doit être rentabilisé, il faut une fois déployé, en sortir toutes les informations disponibles, les étudier, challenger les équipes pour obtenir l’optimisation recherchée au départ : un ajustement régulier des affectations moteurs pour optimiser les kilomètres contrats, déterminer des objectifs d’amélioration des coûts de détention, déterminer la bonne durée, diminuer son stock, améliorer les prix moyens pondérés des articles chaque année, augmenter la productivité de ses équipes d’atelier et lancer une analyse comparative entre gestion interne et externe.

En revanche il est essentiel de ne pas oublier au-delà de la bonne exécution du projet informatique, qu’un accompagnement et un soutien par un volet organisationnel et RH est indispensable à son bon fonctionnement sur le long terme. Un gestionnaire doit compléter les équipes de l’atelier ou doit soutenir le responsable achat.

Christelle Bretaudeau

Photos ©Wilfried Maisy / sensimages.fr

 

« Une montagne à franchir ! »

Basée à St Prouant, la société TBC (85) est en cours de déploiement d’une nouvelle solution informatique de l’éditeur Andsoft – gestion de parc et d’atelier, TMS, portail client et différentes interfaces avec l’informatique embarquée Trimble et des systèmes clients. Le projet d’informatisation de l’atelier a débuté en septembre 2019. L’outil FMS a démarré en janvier 2020. La gestion des stocks du magasin est en cours de finalisation. Le parc de TBC compte 267 cartes grises. Témoignage de Virginie Blanchard – Responsable technique – Informatisation de l’atelier

Quelles sont les raisons qui ont motivé votre projet d’informatisation du parc ?

Nous avons décidé de changer tout notre système informatique afin de faire évoluer la société. Concernant le FMS (Fleet management system ou logiciel de gestion de parc), le point le plus important était de connaître le montant de nos dépenses par véhicule, mais également d’avoir une bonne gestion de stock, afin d’éviter le sur-stockage ou la rupture. Car toutes ces pièces ont un coût : d’acquisition, de conservation mais également de dévalorisation.

La gestion de stock est une composante délicate d’un projet d’informatisation d’un atelier : comment avez-vous vécu cette étape ?

Une montagne que nous allons réussir à franchir ! En plus de 30 ans nous avons accumulé beaucoup de pièces et celles-ci étaient dispersées aux quatre coins de notre atelier. Nous avons procédé par étape : trier, jeter, ranger, organiser des nouveaux espaces de stockage, et enfin référencer l’ensemble des pièces et les identifier avec des références internes. Un gros travail qui prend du temps et demande de la patiente, mais qui fut facilité grâce à l’expérience de Raymond notre Responsable d’atelier. Le magasin est maintenant composé de zones, d’allées et d’étagères.

Quels bénéfices avez-vous déjà retirés de votre outil ?

Le service est désormais organisé. Pour chaque travaux à effectuer, les mécaniciens ont une fiche atelier. Sur celle-ci apparait le descriptif de la réparation ou l’entretien à réaliser, mais aussi les pièces nécessaires et l’emplacement de celle-ci dans le stock. Cela permet un gain de temps considérable. De plus, nous pouvons gérer facilement les entretiens (vidange / limiteur / mines …), et ainsi déclencher un entretien interne ou externe. Plus besoin de plusieurs tableaux Excel, à suivre et mettre à jour quotidiennement. Désormais chaque prestation externe ou commande de pièce fait l’objet d’un bon de commande. Cela facilite par la suite le contrôle des factures fournisseurs ainsi que l’enregistrement en comptabilité.


Quelles sont les prochaines étapes ?

Malgré tout le travail réalisé, l’inventaire est toujours en cours. Il nous faut également finir de référencer toutes nos pièces dans le logiciel Andsoft. Dans un second temps, il nous faudra étiqueter la zone de stockage avec nos différentes références internes correspondantes aux pièces. Par la suite, il y aura aussi un travail à faire avec les exploitants, afin d’organiser au mieux le passage des véhicules dans l’atelier et la gestion du planning exploitation.

C.B.

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