Comme les travaux publics, le monde du transport routier observe avec inquiétude les velléités gouvernementales d’augmenter les taxes professionnelles, qu’il s’agisse du gazole non routier (GNR) ou d’une taxe additionnelle sur les fluides frigorigènes HydroFluoroCarbones (HFC), élément indispensable pour maintenir la bonne température dans une caisse réfrigérée. Concernant le GNR, l’affaire pourrait être entendue, si l’assemblée nationale et le sénat sont d’accord dans le cadre du vote de la loi de finance 2019. Ce n’est qu’à la fin novembre, après les allers-retours entre les chambres que nous le saurons. Avant cela les organisations professionnelles vont agir. C’est le cas de le Chaine Logistique du Froid qui rassemble en France Transfrigoroute, UNTF et USNEF. L’originalité de cette organisation est de parler d’une seule voix en rassemblant plus de 120 transporteurs et entrepôts frigorifiques (50000 salariés, 15 000 véhicules et 8 Millions de m3 de stockage négatif), près de 50 équipementiers et constructeurs, 2 fédérations professionnelles et le Cemafroid … L’union fait la force.
L’organisation n’a pas attendu le dernier moment pour agir « Nous sommes particulièrement vigilants. Déjà l’année dernière, nous avons suivi les manœuvres de certains députés qui souhaitaient voir créer une taxe additionnelle sur les fluides frigorigènes (HFC) alors que l’application des quotas de mise sur le marché définis par l’Union Européenne a déjà produit ses effets et que le HFC-R404A, gaz le plus communément déployé en réfrigération embarquée, a déjà subi une inflation spectaculaire et fait l’objet d’une pénurie. A ce stade, cette nouvelle taxe ne ferait que peser sur les capacités financières des entreprises françaises et retarder leurs investissements dans des solutions alternatives », explique Valérie Lasserre, déléguée générale. Donc pour l’instant les envies de taxe des politiques sont surveillées comme le lait sur le feu et l’espoir est qu’elles n’arrivent surtout pas au gré d’un amendement déposé en catimini et voté à 3 heures du matin … Oui, ça arrive !
Valérie Lasserre, déléguée générale
Le GNR, gazole non routier, est beaucoup plus problématique à l’instant présent, car le gouvernement l’a présenté à l’Assemblée Nationale avec la prochaine loi de finance. Il s’agit là de supprimer les avantages d’un carburant à usage uniquement professionnel servant aux engins de chantier, chemin de fer, le matériel agricole, le transport fluvial et le transport routier lorsqu’il s’agit de faire fonctionner les groupes frigorifiques. Dans la proposition du gouvernement, les agriculteurs et les locomotives gardent leurs avantages, le transport fluvial a été réintégré de justesse. En revanche, les travaux publics et le transport routier prennent le maximum … « Il y a en France environ 115000 véhicules frigorifiques dont les groupes fonctionnent pour la plupart avec du GNR et du fluide frigorifique 404A. Selon nos calculs, cela représente 120 millions de litres par an et la dépense supplémentaire pour nos entreprises serait de l’ordre de 50 millions d’euros. La TICPE passerait de 18 euros l’hectolitre à 64 euros ce qui est insupportable », s’inquiète la déléguée générale. L’organisation demande donc le maintien du taux réduit de TICPE sur le GNR utilisé dans le transport frigorifique et l’abandon de tout projet de taxe sur les fluides frigorigènes HFC.
Valérie Lasserre est certaine d’une chose « le développement durable, que nous soutenons, tient sur trois piliers : l’écologie, l’économie et le sociétal. Il est simplement irresponsable de prétendre que pour sauver la planète il faut détruire l’économie qui fait vivre les populations ». Justement, ayant peur des conséquences, les entreprises de travaux publics ont très vite décidé d’agir. Ainsi, la FRTP Bourgogne-Franche-Comté a bloqué des routes au petit matin du 23 octobre. Ce premier avertissement en appellera certainement d’autres. Qu’en sera-t-il pour le transport routier déjà malmené par un projet de taxe sur les poids lourds unanimement rejetée par la profession. Vous lirez notre article à partir de ce lien
Le dernier sujet sur la table est la reconnaissance des entrepôts frigorifiques comme installations électro intensives pouvant bénéficier du taux réduit de CSPE. La fin de l’insécurité juridique concernant l’article 1499 du Code Général des Impôts (CGI) et l’inscription dans la loi de la notion « d’ immobilisation industrielle » en la bornant aux seuls bâtiments ayant effectivement une activité industrielle de fabrication ou de transformation mécanique de produits ou matières. Pour conclure, Jean-Eudes Tesson, président de l’association, se veut ferme : « Ces mesures injustes sont deux épées de Damoclès suspendues au-dessus des entreprises de transport et d’entreposage frigorifiques. Étant confrontées à de nombreux défis RSE et à une très forte pénurie de main d’œuvre dans toutes les catégories de métiers, elles ne pourront pas supporter ces nouveaux efforts financiers sans mettre en péril leur viabilité. »