Forezia : « Le choix d’une optimisation partagée »

Dimitri Devillers, Responsable Transport du distributeur alimentaire Forezia Snacking, détaille l’optimisation de ses flux au moyen de la solution de traçabilité GedMouv, implémentée en partenariat avec ses prestataires transporteurs. Sur Lyon, la PME teste des livraisons par triporteurs, également suivis via l’application mobile.

TRM Le Guide : En préambule, présentez-nous votre société Forezia Snacking et l’organisation de votre service transport.

Dimitri Devillers : Basés au sud de Lyon, forte de 100 collaborateurs, Forezia snacking est une PME familiale spécialisée dans la distribution alimentaire pour le marché de la restauration rapide premium. Nous accompagnons nos clients chainés (50% de notre activité), indépendants (35%) et la grande distribution (15%) dans leur développement sur un plan national. En 2019, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 39 millions d’euros. Notre budget transport est de 4 M€, ce qui représente un ratio de plus de 10% de notre CA. Ce coût important s’explique par des livraisons bi-température (frais et surgelés) d’un poids moyen de 60kg sur un plan national. Ma direction m’a fixée le challenge d’apporter une meilleure qualité de service à nos clients avec la maitrise d’un créneau de livraison de 2h, tout en optimisant nos coûts et en développant de nouveaux modes de livraisons durables.

 

Vous développez donc aujourd’hui une démarche de rationalisation de vos transports. A quels prestataires faites-vous appel ?

Nous travaillons avec une dizaine de transporteurs selon deux modes de livraison : d’une part, des tournées dédiées confiées à des PME locales, pour couvrir les zones les plus denses en camions bi-températures. Sur l’Île-de-France par exemple, nous travaillons avec Prest-Distribution, et sur Lyon, avec Nestrans. Ainsi que Savoie Frais dans le sud hexagonal, et depuis tout récemment, Urby, spécialisée dans les transports « propres ».

 

« Nous partageons le coût de la traçabilité avec les transporteurs. Forezia Snacking assume 100 % des frais fixes, et 50 % du coût variable par position. »

 

Nous maîtrisons l’organisation de ces tournées, sur lesquelles nous déployons la solution de traçabilité GedMouv. D’autre part, sur les territoires où nous enregistrons moins de volumes, nous utilisons de la messagerie classique avec trois acteurs : Stef, STG et JetFreeze (groupe Mousset), et bientôt les transports Jammet.

Dans le cadre de vos tournées régulières, expliquez-nous le choix et l’utilisation de GedMouv.

Tout d’abord, Nous avions la volonté d’exploiter un outil de traçabilité très utilisé par les flottes professionnelles. C’est le cas de GedMouv, qui, en lien avec la bourse de fret B2PWeb, bénéficie de la confiance d’un large réseau de transporteurs. Nous avons démarré la solution GedMouv en janvier 2020 sur l’Alsace, avec un déploiement progressif jusqu’à l’été. Nous organisons 20 à 25 tournées dédiées par jour sur l’ensemble du territoire.

Au niveau opérationnel, les conducteurs sont équipés de smartphones portant l’application GedMouv, dont les données apparaissent sur la plateforme. Celle-ci récapitule les commandes en cours associées aux statuts des livraisons – affecté, accepté, arrivé sur le lieu de chargement, en cours d’acheminement, arrivé sur le lieu de livraison, et livré – ainsi que l’ordonnancement des tournées, qui apparaissent sur une cartographie. Dans un autre onglet, le portail propose des outils statistiques, le taux de ponctualité moyen au chargement, à la livraison, les anomalies, le taux de litige moyen des commandes, etc.

 

« Nous les avons tous consultés pour les impliquer en amont. Avec un argument fort : une baisse des litiges estimée à 20 %. »

 

Toutes nos commandes sont donc transmises via GedMouv. Lorsque nous démarrons un nouveau transporteur, GedMouv prend contact avec ce dernier pour effectuer la formation des équipes et leur affecter un identifiant. Nous paramétrons alors ce code sur toutes les tournées concernées dans notre ERP (logiciel Copilot de l’éditeur Infologic). Ensuite la transmission des ordres est automatique. Tous les après-midi, nous confions les voyages du lendemain à nos prestataires.

Comment avez-vous négocié l’implémentation de la solution de traçabilité auprès de vos prestataires ?

Nos transporteurs, dans leur majorité, ne sont pas équipés d’un système d’information. La solution GedMouv représente donc pour eux une alternative légère, et peu onéreuse, à une informatique mobile et d’exploitation, qui permet aussi de faciliter la facturation. En effet, nous partageons le coût de la solution avec les transporteurs. Forezia Snacking assume 100 % des frais fixes, et 50 % du coût variable par position. Nous comptons 150 à 200 positions actuellement, et 200 à 300 positions par jour en pleine activité.

Votre démarche vise donc une optimisation partagée avec les transporteurs. Dans quelle mesure ?

Ce dispositif est véritablement gagnant-gagnant. Nos exploitants, comme ceux de nos transporteurs, visualisent en temps réel la géolocalisation des véhicules du chargement jusqu’à la livraison du dernier client Forezia. Jusqu’à présent, nos prestataires fonctionnaient par téléphone avec leurs conducteurs.

En réalité, cette optimisation partagée explique le choix de GedMouv. Au début de notre projet de traçabilité, l’objectif était clairement d’obtenir une solution sans coût de développement, mais surtout en impliquant nos partenaires transporteurs. Nous les avons tous consultés pour les impliquer en amont. Avec un argument fort : une baisse des litiges estimée à 20 %. En effet, les réserves mal renseignées à la main ou illisibles étaient courantes… Aujourd’hui, les conducteurs font leur choix dans un menu déroulant. Tout est clair, une position peut être associée à une photographie si nécessaire. Entre le client, le transporteur et nous-mêmes, la transparence des données simplifie la résolution des problèmes.

Tout en misant sur l’informatisation de vos flux, vous venez d’engager des livraisons en triporteurs électriques en centre-ville, avec Urby. Cette startup (filiale de la Poste) a déjà bien grossi, puisqu’elle est implantée dans 18 villes. Quels sont les détails de ce projet ?

Dans une démarche de transition énergétique, nous testons Urby à Lyon depuis le mois de juillet 2020. Urby massifie les flux de produits divers secs et sous température dirigée, au moyen de caisses polyvalentes d’une capacité d’environ 50 kg, adaptables sur les vélos. Malgré ce fonctionnement mutualisé avec d’autres clients, nous imposons à Urby des créneaux de livraison sous contrôle de GedMouv, selon le même modèle que nos tournées dédiées.

Précisons que les livreurs à vélo utilisent l’application GedMouv à laquelle nous avons ajouté une fonction de livraison dans des points de retrait. Si le créneau proposé ne leur convient pas, les restaurateurs ont ainsi l’alternative de récupérer leurs marchandises directement chez Urby, bien placé en centre ville dans les Halles Paul Bocuse. Chaque retrait est associé à une preuve qui apparaît sur la même plateforme en temps réel.

Le test actuel porte sur 15 positions et 500 kg par jour, sachant que Urby enregistre environ 400 positions quotidiennes sur Lyon en vélo ou en véhicule électrique. Après cette phase pilote, nous prévoyons de déployer le même schéma sur l’île-de-France et les agglomérations où nous sommes présents. Parallèlement, nous étudions avec Urby la mise en place d’une solution pour nos clients lyonnais de reverse logistique pour récupérer nos emballages.

Quels sont les objectifs de la traçabilité ?

Le but est d’optimiser nos tournées de livraisons urbaines par secteur géographique, en annonçant à nos clients des créneaux de deux heures. Jusqu’à présent, nous étions susceptibles de livrer la même rue quatre à cinq fois dans la même journée ! D’où l’explosion de nos coûts de transport, et l’alternative des points de retrait que nous mettons aujourd’hui en place avec Urby.

Exploitez-vous un logiciel complémentaire d’optimisation de tournée ?

Pour l’heure, nous n’utilisons pas de logiciel d’optimisation de tournée. Nous optimisons simplement les opérations à partir des données de GedMouv. Nous envisageons néanmoins d’investir dans un logiciel spécifique, en partenariat avec l’éditeur Teliae.

Avez-vous pu déjà constater des améliorations dans vos processus ?

Avec l’avènement de la crise sanitaire à partir du mois de mars, il sera difficile de mesurer précisément les bénéfices de la traçabilité cette année. Mais nous enregistrons déjà une chute de nos coûts de SAV sur ces premiers mois d’implémentation. Nous avons divisé par quatre ou cinq le temps de suivi des tournées par notre service client, qui a également accès à la plateforme GedMouv. Avantage : lorsqu’un client appelle pour connaître le statut de sa livraison, le SAV n’a plus besoin de contacter le service transport, il peut répondre directement.

De plus, certains éléments d’optimisation sont déjà quantifiables. Par exemple, sur l’Île-de-France, nous avions 9 à 10 tournées quotidiennes. Grâce à l’ordonnancement plus logique des positions, nous traitons le même volume avec seulement six tournées ! Le gain est d’ores et déjà très significatif sur ce périmètre.

Avez-vous également défini des objectifs qualitatifs grâce à la traçabilité ?

Les statistiques GedMouv récapitulent le temps passé sur toutes les livraisons, mais aussi les moyennes mensuelles par client, par tournées, par transporteur. Nous avons déjà mis en évidence certains abus, par exemple un destinataire qui retenait systématiquement notre chauffeur environ 45 minutes, le temps que ses réceptionnaires vérifient le contenu de tous les colis ! Après avoir alerté notre client, les choses sont rentrés dans l’ordre. Résultat : nous avons pu ajouter deux points de livraison à la tournée en question.

Autre exemple d’utilisation de ces indicateurs : nous pouvons gérer le stock de palettes Europe client par client, et donc éviter les oublis. Bref, si nous utilisons à bon escient toutes ces données de traçabilité, nous disposons de multiples leviers d’optimisation et d’ « éducation client ».

Comment fonctionne les échanges d’informations pour vos flux de messagerie ?

Nous transmettons les commandes par EDI et visualisons les retours d’information sur les sites Internet respectifs de nos prestataires, mais pas en temps réel. C’est pourquoi nous essayons de développer au maximum des partenariats avec des transporteurs régionaux, dès que nos flux s’avèrent suffisant sur un secteur donné. Ce devrait être le cas l’an prochain sur Reims, Lille, Toulouse et Clermont-Ferrand.

Pour finir, avez-vous défini un objectif global de réduction des coûts ?

Notre objectif s’exprimant en pourcentage du chiffre d’affaires, et sachant que nous avons conclu 2019 à un peu plus de 10 %, nous ambitionnons en 2021 de descendre sous la barre des 9 %, et d’atteindre 8,5 % en 2022.

Propos recueillis par Wilfried Maisy

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