Congrès OTRE le transport routier français est bien défendu

Le 17e congrès de l’OTRE s’est déroulé il y a quelques jours au Stade de France. Le thème était volontairement fort « PME du transport routier : innover ou mourir ! ». Il s’agit d’un véritable enjeu à court terme. Alors dans les réflexions du jour, sur un format court et dense, se sont portées sur l’innovation et la prospective à la fois technologique, l’évolution des véhicules et des énergies, des infrastructures routières. Ainsi qu’un point essentiel sur les métiers du transport, conducteurs en tête, qui vont changer autant que les technologies progressent, que la concurrence ne fait pas de cadeau et que les dirigeants des états et des villes créent des difficultés dommageables à une profession essentielle à l’économie comme au ravitaillement du pays.

Aline Mesples ne s’y est pas trompée, dans son discours devant la ministre des transports, Elisabeth Borne. Tout en faisant part des préoccupations de la profession, elle garde confiance dans un gouvernement qui propose des réformes sociales fortes et précise « Celle de modifier le Code du travail pour favoriser l’emploi et l’activité économique des entreprises du transport routier nous parait essentielle. De la même façon, la réforme annoncée pour début 2018 des régimes de retraite doit nous conduire à entamer sans tarder, une réflexion de branche sur l’avenir du CFA, comme nous nous y sommes engagés. La refonte de l’assurance chômage, de la formation professionnelle et de son financement a l’ambition de revaloriser le travail. Nous espérons ainsi trouver les personnels qui nous font si cruellement défaut actuellement. »

Aline Mesples attend une véritable politique européenne des transports

Aline Mesples évoque ensuite la réforme de la fiscalité des entreprises, engagée dès cet été, qui ne peut que donner des gages aux investisseurs en matière d’attractivité de notre pays en redynamisant l’économie tricolore. Elle doit permettre au transport routier d’investir massivement dans des véhicules propres et connectés. « Nous ne pouvons que saluer l’attention portée aux PME, que nous représentons. » en souhaitant également que les Assises Nationales de la Mobilité qui se déroulent actuellement permettent aux entreprises du transport routier de s’exprimer.

Et de rappeler que le transport routier participe de la vie de notre pays, dans toutes ses dimensions, par :

  • l’acheminement des marchandises, la gestion de pôles de logistique,
  • le transport de personnes, du touriste aux collégiens transportés par autocars,
  • les VTC et le transport de personnes à mobilité réduite,
  • les professionnels sanitaires qui participent à la chaine de soins,
  • le déménagement partenaire des projets personnels des particuliers, mais aussi de l’accompagnement des projets d’entreprises,
  • les transporteurs de fonds et valeurs qui approvisionnent les banques et transportent les recettes des commerces et sociétés de services.

Les partenaires ont déplacé “du lourd”

Mais la présidente s’inquiète « Mais au-delà de ces intentions, des grands projets, la question reste la même : Qui paiera Madame la Ministre ? Et nous savons tous ici que le « taxons le poids lourds » fait partie des recettes faciles ! Encore une fois, et vous-même vous y êtes engagée à de nombreuses reprises, il n’est pas question de revenir à l’écotaxe. Vous avez déclaré clairement et je vous cite ” que nous n’allions pas remettre en place une écotaxe, (…) Je crois aussi que tout le monde peut s’étonner de voir (…) des files de poids lourds étrangers qui traversent le pays, qui du coup génèrent un besoin d’infrastructures, posent aussi des problèmes de sécurité routière et qui, aujourd’hui, parce qu’ils font le plein chez nos voisins, ne participent pas du tout au financement des infrastructures”. L’OTRE ne peut qu’approuver vos propos explicites puisque ce sont les arguments qu’elle tient depuis toujours sur ce sujet. »

Ainsi, l’OTRE continuera à s’opposer à une taxe assise sur les kilomètres parcourus, mais maintient, sous conditions, sa proposition d’instauration d’une vignette, fondée sur un droit d’usage du réseau routier non concédé, à coût fixe et payable par tous. C’est un système simple et surtout équitable. Et Aline Mesples précise « Mais qui dit équité, dit aussi justice. Et notamment justice fiscale. Les assises nationales de la mobilité doivent être l’occasion d’une présentation officielle des comptes de la route : recettes actuelles, principalement TICPE, TSVR et ceux de ses coûts sur le réseau concédé et non concédé. En ce qui concerne les 4 centimes additionnels sur le gazole en compensation de l’abandon de l’écotaxe, ceux qui affirment qu’elle vaut solde de tout compte se trompent. Elle coûte très cher aux entreprises françaises, n’impacte pas les pavillons étrangers, ne résout nullement la question du financement des infrastructures et laisse le champ libre aux initiatives régionales. Nous avions déjà pointé ce risque lors de sa mise en place. Aujourd’hui ces initiatives voient le jour. Justice du financement dit aussi généralité. C’est-à-dire que tous les véhicules doivent être concernés. C’est d’une importance capitale. »

Elisabeth Borne, une ministre appréciée

Concernant le projet de loi de finances 2018, construit dans l’objectif de concilier des baisses d’impôts avec une réduction du déficit public, la profession soutient cette volonté politique car le poids des impôts et charges qui pèsent aujourd’hui sur les PME nuit à leur compétitivité. Toutefois deux points attirent la vigilance. D’abord, la hausse de la taxation du diesel de 7,6 centimes et le plan de convergence fiscal annoncé, pour laquelle une compensation totale par une récupération est prévue pour les professionnels. « Mais cette compensation à postériori va considérablement impacter la trésorerie des entreprises. Dans ces conditions, l’OTRE réclame la mise en place d’un gazole professionnel. La réflexion pourrait s’articuler concrètement par la mise en service de pompes identifiées qui distribueraient aux entreprises du gazole détaxé sans que leur trésorerie soit obérée. » propose la présidente qui souhaite un élargissement aux véhicules de moins de 3,5 tonnes ou de moins de 10 places.

Le second point de vigilance porte sur l’augmentation attendue des recettes des contrôles radars. Augmentation assurée selon Bercy, par la « dynamique » du volume d’amendes infligées aux usagers de la route et par l’externalisation des opérations de contrôles contre laquelle les transporteurs ont vigoureusement manifesté notre opposition. « Une fois de plus, ce sont les salariés et nos entreprises qui vont supporter une politique de sanctions injustes, de la double peine puisque non seulement il faudra payer mais au surplus le conducteur routier privé de permis, perdra son emploi. Est-ce juste ? Pour l’OTRE, ces nouvelles dispositions légales ne sauraient rester en l’état. Elles doivent être suivies d’une réforme du permis de conduire des personnels roulants du transport routier. » propose Aline Mesples qui dans la suite de son discours parlera du détachement du personnel et du paquet mobilité (récemment évoqué sur Transportissimo)

L’OTRE fait salle comble

Pour l’OTRE, la France doit tenir une ligne ferme et déterminée sur cinq sujets majeurs :

  • 1er sujet : le cabotage: Nous sommes opposés à toute libéralisation du cabotage.
  • 2ème sujet : le détachement des travailleurs salariés: le travailleur salarié est détaché sur toute opération de cabotage et sur le transport international, sauf départ et/ou retour pays d’origine.
  • 3ème sujet : les conditions de vie et de travail des conducteurs: nous sommes opposés à une réforme des temps de repos hebdomadaires dits courts et favorables à l’interdiction de repos dits longs en cabine,
  • 4ème sujet : les véhicules utilitaires légers: Le transport par véhicule utilitaire léger doit enfin répondre aux mêmes conditions d’accès à la profession et règles sociales que le transport en véhicules lourds.
  • 5ème sujet : la tarification des infrastructures: nous sommes hostiles à la tarification kilométrique qui n’est pas adaptée à la France qui dispose déjà d’un important réseau autoroutier concédé, payant.

« Vous avez Madame la Ministre, déjà fait part de votre souhait de faire évoluer le projet et ses mesures dans un sens plus favorable aux travailleurs et à la lutte contre le dumping social et la fraude. Nous vous soutenons pleinement dans cette volonté et je me permets de vous rappeler combien nous comptons sur votre détermination. Au-delà, d’un impact direct sur la vie économique et sociale de nos entreprises, cette question européenne interroge notre organisation sur l’attractivité de nos métiers essentiellement de conduite et de notre incapacité actuelle à recruter malgré un chômage endémique dans notre pays. En effet, différentes enquêtes d’opinion démontrent que le transport routier souffre d’une image négative en matière de conditions d’emploi. » rappelle Aline Mesples qui alerte la ministre sur le scepticisme des chefs d’entreprises comme des salariés du transport, vis-à-vis du projet économique et social européen « alors que l’Europe devait être une chance pour le transport routier, pour toutes nos entreprises, elle est devenue un motif d’inquiétude voire d’hostilité. Car rien n’a été fait pour limiter la concurrence entre les États. Cette situation est dévastatrice sur le plan social et, je l’ajoute, sur le plan environnemental. Les travaux que le Président de la République appelle de ses vœux pour une refondation de l’Europe doivent répondre à ces inquiétudes. Il est rassurant qu’il soit soutenu dans cette démarche par la Chancelière allemande. Mais n’est-il pas trop tard pour l’Europe des transports ? » s’inquiète la présidente.

OTRE l’équipe opérationnelle pour un congrès réussi

Et de conclure

« De nombreux pays sont prêts à accepter un durcissement des conditions de détachement du personnel sur l’ensemble des secteurs, à condition que le transport routier en soit exclu ! La raison en est simple : le transport routier est un acteur au service de la régulation ou de la dérégulation de l’économie selon ce qu’on décide, selon ce que l’on veut ! En effet :

  • Un transport routier de marchandises international à bas coût est un accélérateur de délocalisation.
  • La captation de marché nationaux par des pavillons étrangers low cost favorise les géants du numérique qui commercialisent des produits souvent très délocalisés avec une emprunte carbone très négative.
  • Concernant le transport routier de voyageurs, si ce secteur d’activité ne ressent pas encore aussi fortement les méfaits du dumping social, nous commettrions une erreur stratégique en le sous-estimant. Le transport de tourisme commence à constater des dérives sérieuses aboutissant à la captation de son marché intérieur.

Au-delà des transports internationaux de marchandises ou de voyageurs, chaque pavillon routier national a vocation à assurer les transports dans ses frontières. Tout autre modèle est un modèle de captation de marché par le dumping social. »

La profession a besoin d’être bien défendue … elle l’est !

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